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Intentions

Mon arrière-grand-mère s’habillait chic pour regarder la lutte à la télé. Au cas où les lutteurs pourraient la voir. Pour elle, pas de doute, la lutte, c’était vrai. La télé aussi. Pour ma part, les lutteurs que je voyais au petit écran le dimanche matin et dont je reproduisais les prises les plus spectaculaires avec mon meilleur ami me semblaient relever d’un univers fictif. Je préférais croire que des méchants aussi méchants, ça n’existait que sur le couvercle de ma boîte à lunch. Hulk Hogan, Andre The Giant, Bret Hart, Mad Dog Vachon... Mad Dog : Sa férocité, sa voix épouvantable, son visage mi-bouledogue, mi-humain transcendaient le ring. Le plus célèbre des vilains québécois faisait trembler la terre entière. 

En novembre 2013, comme tout le monde, j’ai appris le décès de Mad Dog l’enragé. La réalité venait de détruire une légende intouchable, de tuer un mythe. Mad Dog était donc mortel? Mad Dog était donc vrai? Maurice Vachon faisait à nouveau la une des journaux du monde. Partout, on rappelait ses plus grands exploits, les plus grands moments de sa vie hors du commun. Des politiciens, des joueurs de hockey, des vedettes du spectacle étaient en deuil. Je réalisais que Mad Dog avait été l’idole de mes grands-parents, de mes parents; l’idole de mes idoles. 

Quand on m’a proposé, un an plus tard, de tourner une entrevue avec son frère Paul « The Butcher» Vachon, je n’ai pas hésité une seconde. L’occasion était trop belle de découvrir ce qui avait tant fasciné le Québec pendant toutes ces années. J’étais loin de me douter de ce qui m’attendait. 

L’ex-lutteur que j’ai rencontré m’a raconté plus d’histoires que je ne pouvais en espérer, m’emmenant dans un monde étonnant, bouleversant, burlesque. Conteur hors-pair, il était plus grand que nature; un véritable « showman ».
J’étais conquis. Il y avait là bien plus qu’une entrevue, bien plus qu’un reportage sur la lutte ou les Vachon. Il y avait là une formidable aventure, digne du grand écran. J’en étais sûr : il y avait là un film.

Ça fait maintenant quatre ans que cette première entrevue a eu lieu. Quatre ans que je suis Paul Vachon dans son étrange vie de gypsie, bouche bée, yeux écarquillés, espérant être à la hauteur de la grande histoire qu’il me confie. Au gré de nos rencontres, Paul et moi sommes devenus complices, mais malgré le temps passé à ses côtés, j’ai encore du mal à tracer la ligne entre le vrai et le faux. 

Je suis devant Paul Vachon comme devant le personnage de Big Fish. Comme lui, Paul semble croire que « s’en tenir aux faits, ce n’est pas compliqué, mais ce n’est pas très captivant ». Ça me va. Mad Dog et The Butcher appartiendront toujours à un monde qui s’embarrasse peu de vérité, en autant que le spectacle soit grandiose et que le public soit mystifié et ravi.

C’est aussi ce que j’espère vous offrir avec avec ce film : du grandiose qui rend heureux, du fabuleux, de l’imaginaire, de la magie. Une réalité qui dépasse la fiction. 

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